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Obésité : la piste immunitaire
Des chercheurs du Laboratoire d’immunobiologie de l’ULB ont identifié l’un des mécanismes induisant l’inflammation dans le tissu adipeux des sujets obèses. Cette découverte ouvre peut-être la voie à des immunothérapies de l’obésité.
Chez les sujets en bonne santé, le tissu adipeux abrite un stock de cellules immunitaires. Notamment des lymphocytes innés de type 2, à fonction anti-inflammatoire. Ces lymphocytes contrôlent notamment la différenciation et la fonction des cellules dans le tissu adipeux (homéostasie).
Chez les sujets obèses, ce système de rétrocontrôle est perturbé. Leur graisse abdominale est infiltrée par des cellules immunitaires (de type 1) qui, elles, induisent une réponse inflammatoire. Or, il a été démontré que l’inflammation chronique joue un rôle prépondérant dans l’apparition du diabète et d’autres comorbidités cardiovasculaires liées à l’obésité.
La voie PD1/PD-L1 activée En collaboration avec des chercheurs français et hollandais, Guillaume Oldenhove et Muriel Moser, chercheurs au Laboratoire d’immunobiologie de l’ULB, ont mis en évidence l’un des mécanismes immunitaires expliquant cette inflammation.
« Les lymphocytes de type 2 des souris soumises à un régime riche en graisses expriment le récepteur inhibiteur PD-1 », explique la Pr Muriel Moser, doyenne de la Faculté des Sciences de l’ULB.
« Parallèlement, les macrophages – qui, en temps normal, veillent au bon fonctionnement du tissu adipeux – sont activés par des adipocytes qui meurent par nécrose. Ils deviennent alors inflammatoires et se mettent à exprimer le ligand PD-L1. Une fois la “clé” PD-L1 liée à la “serrure” PD-1, les lymphocytes de type 2 voient leur fonction anti-inflammatoire inhibée. Ce qui laisse le champ libre à la prolifération des cellules immunitaires de type 1 dans la graisse abdominale, avec les conséquences que l’on sait. » Des pistes thérapeutiquesCette découverte a fait l’objet d’une
publication dans la revue « Cell Reports ». Et elle ouvre la voie à plusieurs pistes thérapeutiques.
« Par exemple, en bloquant PD-1 avec un anticorps anti-PD1, peut-être pourrions-nous renverser la tendance », explique la Pr Moser. Avec les mêmes anti-PD1 que ceux utilisés en immuno-oncologie ?
« Dans le cadre d’une obésité, ce serait délicat, à cause des effets secondaires parfois induits par ces médicaments. L’idéal serait plutôt de trouver un inhibiteur en amont, spécifique du tissu gras et sans les toxicités des immunothérapies utilisées contre le cancer. »Perspectives de rechercheMais avant, il convient d’aller plus loin dans la compréhension de ces mécanismes immunitaires complexes.
« Nous aimerions identifier les toutes premières étapes de l’inhibition. Qu’est-ce qui active les macrophages et la réponse inflammatoire ? Nous avons identifié la cytokine IL-33 comme facteur activateur, mais il y en a sans doute d’autres. Et il nous reste aussi à découvrir pourquoi et comment, exactement, agit PD-1 dans le contexte de l’obésité. » Une chose est sure : dans cette maladie, l’angle immunitaire est prometteur !